Les personnes qui perçoivent des dividendes d'origine étrangère voient souvent leur rendement partiellement diminué en raison de leur double imposition (application du précompte mobilier à l'étranger et imposition en Belgique). Pourtant, certaines conventions de double imposition prévoient la possibilité de remédier à cela. L’administration fiscale belge a toujours refusé d’en tenir compte mais la jurisprudence récente vient au secours des contribuables et offre des possibilités intéressantes.
Dividendes étrangers: double imposition!
Aujourd'hui, de nombreux Belges possèdent des actions étrangères. Non seulement parce qu'ils recherchent des rendements et investissent dans des entreprises étrangères, mais également parce que de nombreuses entreprises multinationales rémunèrent leurs employés au moyen d’Incentive Programs. Si certains objectifs sont atteints, ces employés se voient attribuer des actions de l'entreprise étrangère (par exemple via des options sur actions ou des RSU’s).
Toutefois, les dividendes reçus provenant d'actions étrangères sont soumis à une double imposition :
d'une part, ces dividendes sont soumis à une retenue à la source à l'étranger. Le taux varie d'un pays à l'autre ;
d'autre part, ces dividendes sont également imposables en Belgique, actuellement à hauteur de 30 % (les dividendes sont exonérés jusqu'à 800 euros pour l'année de revenu 2019).
Les conventions de double imposition conclues par la Belgique prévoient généralement que la retenue à la source par l’état étranger concerné doit être limitée. Si cette retenue à la source à l’étranger dépasse cette limite, la différence pourra être récupérée (bien que la procédure pour ce faire soit assez lourde). Ainsi, malgré cette limitation, la double imposition subsiste, fût-ce partiellement.
En principe, il convient d’indiquer dans sa déclaration fiscale belge le montant perçu ou obtenu (avec certaines corrections si nécessaire). Le montant perçu ou obtenu correspond au revenu brut déduction faite de la retenue à la source étrangère. Toutefois, une instruction interne publiée récemment par l’administration fiscale belge indique qu’il ne peut être tenu compte de la retenue à la source étrangère que dans la mesure où elle ne dépasse pas le taux prévu par la convention de double imposition dont il est question. Cette instruction est déjà appliquée dans la pratique. À notre avis, celle-ci est contra legem et un contribuable peut effectivement imputer la retenue à la source effectivement retenue.
Eliminer la double imposition: QFIE!
Certaines conventions de double imposition atténuent par ailleurs également la double imposition par le biais d’une « quotité forfaitaire d’impôt étranger » ou « QFIE ». Habituellement, la QFIE s'élève à 15 % du dividende net reçu. Les conventions de double imposition conclues avec la France, l'Italie ou encore Israël par exemple prévoient une QFIE.
La QFIE permet de réaliser une économie significative d’impôts. Un simple exemple chiffré permet de s’en rendre compte (en supposant une retenue à la source étrangère et une QFIE de 15 %):
Sans la QFIE |
Avec la QFIE |
|
Dividende perçu |
100 |
100 |
Retenue à la source étrangère |
- 15 |
- 15 |
Base imposable en Belgique |
85 |
85 |
Imposition en Belgique (30%) |
- 25,5 |
- 25,5 |
QFIE |
- |
12,75 |
Total |
59,5 |
72,25 |
Cependant, depuis une trentaine d’années, le droit interne belge ne prévoit plus la possibilité pour les personnes physiques de réclamer cette QFIE. Certains contribuables ont donc contesté leur propre déclaration et ont tenté de se prévaloir de la QFIE au moyen d’une réclamation fiscale Sans succès.
Confirmation jurisprudentielle
La jurisprudence a toutefois condamné clairement la position de l’administration fiscale. En 2017, la Cour de cassation a en effet jugé que la convention belgo-française de double imposition prime sur le droit belge, de sorte qu'un contribuable peut effectivement se prévaloir de la QFIE de 15 % (Cass. 16 juin 2017, F.15.0102.N). Le dossier a été renvoyé devant la Cour d'appel d'Anvers, qui a récemment confirmé cette position (Anvers, 17 décembre 2019, 2018/AR/1588).
Cela signifie-t-il que cette discussion est désormais entièrement clarifiée ? Pas encore, car une autre affaire similaire est toujours pendante devant la Cour de cassation. L’administration fiscale attend cet arrêt afin de réviser éventuellement sa position à cet égard. Inutile toutefois de dire que sauf retournement de situation inattendu, le dénouement final en faveur des contribuables est proche.
Faites valoir vos droits!
Si vous recevez des dividendes étrangers, nous vous conseillons de vérifier si une économie d’impôts ne peut être obtenue au moyen d'une QFIE basée sur une convention de double imposition. Si tel est le cas, vous pouvez faire valoir vos droits, y compris pour le passé. Cela peut se faire en soumettant une réclamation (si le délai de réclamation n'a pas encore expiré) ou en soumettant une demande de dégrèvement d'office. Dans ce dernier cas, vous pouvez remonter jusqu'à 5 ans en arrière, c'est-à-dire contester les impôts établis à partir de 2016.